Le coronavirus, comme révélateur d’une urgence… Celle d’apprendre à vivre et à travailler ensemble

Nous n’avions pas besoin du coronavirus pour révéler le dysfonctionnement de notre société et du manque de courage des gouvernants, depuis quelques années déjà.

Au regard des moyens manquants en termes de santé, des questions qui émergent quant aux populations (carcérales, jeunes en difficulté, personnes victimes de violences et tenues plus encore par le confinement), populations dont les différents ministères ont la charge (santé, justice, éducation…), cela ne peut que nous interroger… est-ce que nous voulons que le marché seul continue à dicter sa loi ? Est-ce que la mission du service public, cela veut encore dire quelque chose ?

Nous pouvons interroger ce qu’est le soin aujourd’hui en France, de même que la justice ou encore l’éducation.

L’exercice du pouvoir dans la cité

Si cette crise n’entraine pas une remise en cause de la façon dont les chefs d’état prennent soin du pouvoir régalien qui leur incombe, si aucune leçon n’est tirée de ces dysfonctionnements, alors ils mettent en cause la souveraineté de l’état.

Dans cette crise que nous traversons, chacun de nous est touché et évidement plus encore les familles qui jouissent de revenus modestes. Au premier plan, au niveau de la santé.

Elle pose également la question de la frontière, des territoires de chacun, de l’attention que nous nous devons les uns, les autres.

Du fin fond de notre confinement, le coronavirus « casse » notre individualisme, il nous appelle collectivement à l’ici et maintenant. Il nous appelle au-dedans alors que nous étions dans une fuite, au-dehors. Que faisons-nous avec nous-mêmes, que faisons-nous avec nos familles, que faisons-nous avec les autres ?

Quand les schémas établis tombent, que notre train train est disqualifié, nos désirs profonds émergent à nouveau et viennent frapper à la porte.

Le mien est simple. Je m’interroge et espère que cette « loi du marché », qui résonne comme un parti pris évident, qui teinte la gouvernance de notre pays, soit relativisée. Qu’elle le soit dans la sphère politique mais qu’elle le soit également dans le monde du travail.

Notre façon de penser l’entreprise

J’ai, depuis le début de la crise, en lien direct, des collaborateurs effrayés par leur état de santé et par les conséquences de ce confinement sur leur emploi. Mais aussi des managers qui doivent assurer une continuité dans la « gestion » de leurs équipes, à distance. Apprendre à « gérer à distance » cela prend habituellement plusieurs mois voire quelques années, ne serait-ce que pour passer à un rythme d’une journée, voire de deux journées (souvent un maximum) par semaine. Actuellement, ils passent, pour la plupart d’entre eux, tout leur temps en travail à distance. Ces managers, qui en prend soin ?

Les DRH eux sont exténués, eux qui portent la « promesse humaine » de l’entreprise et qui challengent en ce moment les accords sociaux tout en s’évertuant à faire barrage des décisions dont ils sont les destinataires et qui les amèneraient à annuler tout le soutien, les accompagnements et les formations qui avaient été décidés avant l’arrivée du coronavirus.

Les directeurs généraux sont saturés eux aussi par leurs charges et les cellules de crises journalières se succèdent dans la journée, quand leurs entreprises sont d’une taille conséquente. Ils ne dorment plus la nuit quand celles-ci sont à taille humaine. Comment gérer la trésorerie, faut-il maintenir les investissements et les recrutements, comment payer l’URSSAF ?

Heureusement, sur ces volets, l’état a fait quelques pas. Cela ne dit pas comment la facture liée à ces aides, mais aussi due à l’état du marché mondial, sera payée dans quelques mois. Sans oublier qu’avant le coronavirus ils ont été touchés par les mouvements des gilets jaunes, puis par les grèves qui étaient eux-mêmes le signe d’un grave dysfonctionnement sociétal.

Cette situation impacte toute personne dans son rapport au travail.

En quoi peut-elle être le ferment d’un changement de fond, à venir ?

Le monde est dans une tension sans précédent et dans ce monde il faudra, plus que jamais, s’interroger sur le modèle de société que nous voulons voir émerger.

Plus que jamais, nous avons besoin, tous les salariés ont besoin, d’être traités comme des humains, non comme une variable d’ajustement. L’entreprise d’aujourd’hui doit apprendre à “faire avec” ses salariés, apprendre la concertation. Mettre en place de nouvelles formes de gouvernance, d’autres façons de décider, collectivement. Promouvoir une capacité, ériger des lieux pour dire sa souffrance, celle-ci existera toujours dans toute société organisée, dans tout collectif.

C’est la seule façon pour elle de permettre à chacun de trouver de l’énergie et des façons de la renouveler. Cette « énergie », appelons la « humanisme ». Elle sera d’autant plus sollicitée dans l’après-crise. Pour qu’on puisse prendre appui sur elle, nous nous devons de rentrer collectivement dans une société du soin, de l’attention à l’autre et à tous les autres.

Chacun de nous a une responsabilité pour autrui. Le visage de l’autre m’appelle à répondre de lui, nous enseigne Levinas.

Faisons quelque chose pour nous-mêmes, faisons quelque chose de nous-mêmes, faisons quelque chose pour tous ceux qui nous entourent. Que ces enseignements issus de la crise sanitaire qui nous ébranlent ne restent pas lettre morte, en sortie de crise. C’est ce que le coronavirus rappelle d’une façon crue. Mais il nous enseigne aussi que prendre la loi du marché comme seul repère, cela a assez duré.

Il n’est plus possible d’envisager de continuer comme avant… Alors bâtissons ensemble l’entreprise de demain, une entreprise de la concertation et du respect.

Chacun des salariés a un mot à dire de là où il est, il peut, il doit devenir acteur et auteur de son histoire tout autant que de l’histoire collective.

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